Je n’attends pas que mon réveil sonne pour décamper. Les fourmis et les moustiques me font la fête. Je continue à longer ce beau et large Danube qui m’invite aussi à la baignade. Il est 10h30 et il fait au moins 28C et l’eau est, on peut dire, rafraîchissante. Tout le long du fleuve, il a des petites cabanes sur pilotis avec un balcon et un appareillage de filets et de poulies pour pêcher depuis la côte. Je suis seule, de temps en temps, je crois un pêcheur ou un cycliste. La chaleur se fait vraiment ressentir, surtout en traversant de vastes étendues de champs, sur la route des Romains. De temps en temps, je perçois un signe du chemin de Saint-Jacques de Compostelle. En effet, il débuterait en Autriche, pas très loin de là où je me trouve. Je m’arrête à Petronell-Carnuntum et devant le musée d’archéologie et son amphithéâtre, je scrute les panneaux annonçant et présentant les activités du village. C’est bon, je sais où me diriger : chez Mathilde Hörler. Je la trouve dans son jardin, en bleu de travail, les mains et la tête dans les fleurs.
Mathilde est une spécialiste de la chromatographie : il s’agit d’une sorte de « photographie » des plantes. A la place de mélanger les couleurs comme il est commun dans la peinture, tu laisses parler les plantes. Et tu t’aperçois que les plantes ont une âme. Elles démontrent par ce long processus des couleurs incroyables, des motifs précis et précieux. Et ces images sont vivantes car elles se développent encore des années plus tard. Mathilde me raconte qu’il faut qu’elle cueille, connaisse les plantes avec lesquelles elle travaille. Puis cela dépend aussi de l’énergie dont elle est chargée qui influence le processus. Chaque chromatogramme est unique et a sa propre énergie. Cela me rappelle les travaux de Maria Lassnig qui travaillait sur le ressenti du corps « Körperabdrückegefühlte ».
Mathile est l’une des rares personnes à travailler dans ce domaine qui touche à la chimie, la biologie et pour cette raison elle est invitée à des séminaires pour présenter ses créations.
Chromatogramme de crocus, Mathilde Hoerler
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